CHANGE - Le système monétaire européen

CHANGE - Le système monétaire européen
CHANGE - Le système monétaire européen

Le monde recherche depuis longtemps la compréhension intellectuelle permettant la mise en œuvre d’un véritable système monétaire international ordonné. Un tel système n’existe pas encore à ce jour, certains auteurs célèbres comme Jacques Rueff ou Robert Triffin n’ayant pas hésité à décrire les systèmes actuels comme des «non-systèmes».

Autrefois, les échanges internationaux étaient effectués sur la base du troc, échange direct d’une marchandise contre une autre. L’introduction des matières précieuses, argent ou or, a considérablement modifié la nature des rapports commerciaux. Mais la principale révolution a été apportée par la dématérialisation de la monnaie. Aujourd’hui, la monnaie bancaire n’est plus une matière physique rare, donc précieuse; elle est une «simple» écriture comptable dans une banque [cf. MONNAIE]. En d’autres termes, la monnaie moderne n’existe que sous la forme de comptes en banque. Même les billets ou les pièces ne sont plus que des duplicata de dépôts effectués par les banques commerciales au sein de la banque centrale.

Pour bien saisir la problématique du système mis en place à l’échelle de l’Europe, il est nécessaire de commencer par un énoncé des principes fondamentaux régissant tout (non-)système monétaire organisé sur une certaine stabilité.

1. Les principes fondamentaux

Deux principes de base caractérisent le fonctionnement des différents systèmes monétaires ayant été récemment ou étant encore en vigueur en Europe, plus particulièrement le plus récent d’entre eux, le système monétaire européen: le principe de marché et celui de l’encadrement des cours de marché.

Le principe de marché appliqué aux monnaies: le marché des changes

Une monnaie nationale est dite totalement convertible quand il est possible, sans restriction, de l’échanger contre une autre monnaie nationale. Le marché des changes est le marché sur lequel peuvent s’échanger les différentes devises. Le cours de change est le rapport auquel s’échangent deux monnaies nationales. Ce cours résulte de la confrontation de l’offre et de la demande. Les forces qui s’exercent sur le marché des changes ont des motivations commerciales mais aussi financières et, plus particulièrement, spéculatives. La réalité des faits est que l’essentiel (78 p. 100 selon les experts de la Réserve fédérale américaine) des transactions quotidiennes sur le marché des changes relève de la spéculation pure, une faible partie seulement correspondant aux besoins des entreprises pour leurs opérations commerciales ou leurs investissements.

Toute différence entre l’offre et la demande sur le marché tend à écarter le cours de change de son niveau précédent. Toute nouvelle égalité entre l’offre et la demande maintient le cours du marché à son nouveau niveau, sans nécessairement le ramener à son cours précédent. Ainsi, l’égalité entre l’offre et la demande peut aussi bien établir un cours du dollar à 4 FRF qu’à 10,61 FRF, l’expérience des années 1980-1990 l’a prouvé. Un cours d’équilibre peut être déterminé par le marché à n’importe quel niveau, y compris le plus absurde, le plus en contradiction avec ce qu’il est convenu de nommer les données fondamentales (fundamentals ) de l’économie.

D’innombrables moyens ont été utilisés pour tenter de remédier à ces regrettables situations, le plus performant, quoique géographiquement limité, étant incontestablement le système monétaire européen. Toutes ces tentatives ont consisté dans la volonté d’encadrer les cours de marché par des marges que l’on aurait voulu infranchissables.

Le principe d’encadrement des cours déterminés par le marché

Le système monétaire européen (de même que le système monétaire international tel qu’il a fonctionné depuis la conférence de Gênes en 1922 jusqu’au 15 août 1971, date à laquelle le président Nixon décida de suspendre la convertibilité du dollar en or) repose sur le respect du concept de marché et sur un ensemble de mesures évolutives ayant pour but la régulation de ce marché. À ce titre, les autorités politiques et monétaires ont adopté des «références», des repères destinés à fixer des limites aux fluctuations des cours déterminés par le marché.

Les concepts de cours pivot, de cours plancher et de cours plafond

Un cours pivot (terminologie employée dans le cadre du système monétaire européen), un cours central (l’expression est apparue en décembre 1971, dans un document du F.M.I. intitulé Taux centraux et marges élargies ) ou encore une parité officielle correspondent à un cours de référence adopté par consentement mutuel entre les différentes autorités monétaires et politiques nationales. Ce n’est pas un cours de marché mais un concept purement théorique, un cours arbitraire. Le marché continue à déterminer son cours dit d’équilibre en toute liberté par confrontation de l’offre et de la demande. Aucune transaction n’est effectuée à ce cours pivot en tant que tel. Les concepts de cours plancher et de cours plafond ne sont pas non plus des cours de marché mais des bornes abstraites définissant des frontières que les cours de marché ne devraient pas parvenir à franchir. Ces cours limites sont généralement définis de part et d’autre des cours pivots.

Toutes les opérations commerciales ou financières s’effectuent au cours du marché. Le cours de chaque devise européenne membre de ce S.M.E. fluctue de part et d’autre du cours pivot, mais à l’intérieur des limites que représentent le cours plancher d’une part et le cours plafond d’autre part (fig. 1).

Il est essentiel de ne pas confondre la fixité des parités (ces cours dits de référence ne sont aucunement des cours de marché; abstraits, ils sont déterminés par les autorités monétaires et politiques nationales) et la fixité des cours de change. La fixité des cours de change n’a jamais existé dans l’histoire monétaire occidentale depuis Bretton Woods. Elle n’existait pas même sous le régime découlant de la conférence de Gênes de 1922. Ce qui est fixe, c’est ce couloir à l’intérieur duquel les cours de change restent déterminés par confrontation de l’offre et de la demande, donc par le marché. Encore ces couloirs sont-ils plus ou moins fréquemment réajustés; on parle alors de dévaluation ou de réévaluation (fig. 2).

La nature des actions visant à stabiliser les cours de marché

Qu’est-ce qui empêche les cours de marché de s’écarter de ce couloir défini en ses parties extrêmes par le cours plafond et le cours plancher? Le cours de marché est déterminé par la seule confrontation de l’offre et la demande. Rien ne l’oblige donc a priori à limiter ses fluctuations dans le temps à l’intérieur des limites qui lui semblent ainsi officiellement fixées. Rien, effectivement, si ce n’est l’action des pouvoirs publics sur l’offre ou sur la demande excédentaire. En effet, les pouvoirs publics ne peuvent agir (sauf à rejeter complètement le système, ce qui n’a encore jamais été fait dans les pays occidentaux) que dans le respect de ce principe de marché. En l’état actuel du fonctionnement du système monétaire européen (il en est de même du système monétaire international), le principe de marché est un principe fondamental et infrangible. Le principe d’encadrement des cours de marché ne peut, comme son nom l’indique d’ailleurs, qu’être greffé sur le principe de marché.

Le rôle des banques centrales européennes consiste donc, quand le marché dégage une offre excédentaire de devises en terme d’une monnaie nationale donnée, à se porter acquéreur de ces devises. Quand, à l’opposé, le marché révèle une demande excédentaire de devises contre cette monnaie nationale, les banques centrales se procurent ces devises (par emprunt à l’étranger, diminution des réserves officielles, etc.) et les cèdent sur le marché afin de lui faire retrouver une situation d’équilibre, celle-ci ne se situant plus nécessairement au même niveau.

Une autre politique de plus en plus développée, voire devenant la principale, consiste à modifier les taux d’intérêt appliqués au refinancement des banques commerciales, de sorte que ce soit le marché lui-même qui effectue les corrections désirées par les autorités monétaires.

Le fonctionnement du système monétaire européen actuel est tel qu’il n’existe aucun automatisme équilibrant en permanence les forces du marché. Les interventions sont fondées sur le volontarisme et la coordination entre les autorités monétaires concernées. Ces interventions sont limitées par les moyens réels dont disposent les banques centrales, lesquels ne sont ni sans lourdeur ni sans conséquences. Entrent aussi en ligne de compte des considérations éminemment politiques.

Construit sur ces deux principes fondamentaux, le principe de marché et celui d’encadrement des cours de marché, mais aussi sur les mesures de financement afférentes, le système monétaire européen est, sans aucun doute, la plus élaborée de toutes les tentatives de réforme monétaire internationale (limitée ici à l’échelle d’un certain nombre de pays du Vieux Continent) qui se sont succédé avec plus ou moins de succès depuis 1922.

2. Historique cursif

L’Europe monétaire s’est constituée progressivement, en marge du traité de Rome. Celui-ci, signé en 1957, donnait naissance à la C.E.E., mais il était très laconique quant au domaine monétaire qui était abordé essentiellement en termes de balances des paiements. Le caractère continu, même si irrégulier, de la construction économique de l’Europe a mis en valeur l’importance des problèmes monétaires auxquels les responsables politiques et économiques ont été conduits à rechercher des solutions.

Plusieurs plans, projets ou propositions ont été suggérés ou appliqués, devant conduire à la mise en œuvre d’une Europe monétaire, certains d’entre eux étant fréquemment désignés du nom de leur principal signataire. Citons l’Union européenne de paiement qui a fonctionné de 1950 à 1958, l’Accord monétaire européen (à partir de 1958), le rapport Marjolin en 1962, les deux plans Barre de 1969 et 1970 et surtout le rapport Werner de 1970 qui reste une référence en la matière.

L’abandon de la convertibilité du dollar en or, le 15 août 1971, suivi d’un flottement généralisé et désordonné des monnaies, a généré de graves problèmes pour les Européens. C’est précisément pour réduire, au moins à l’échelle européenne, cette instabilité des monnaies sur le marché des changes, que la plupart des pays membres de la Communauté économique européenne (C.E.E.) ont mis successivement en place plusieurs systèmes devant théoriquement conduire, à terme, à une union monétaire européenne. Stabiliser le cours extérieur des monnaies nationales et, en conséquence, réduire les effets induits par le désordre monétaire international à l’intérieur des économies nationales, telle est l’optique dans laquelle ont été conçus puis perfectionnés ces différents systèmes, le système monétaire européen en étant la forme la plus achevée.

Un accord dit «accord de Bâle» fut signé entre les six pays membres de la Communauté économique européenne (la république fédérale d’Allemagne, l’Italie, la France, la Belgique, le Luxembourg et les Pays-Bas), instituant le «serpent monétaire européen». Ce serpent, opérationnel dès le 24 avril 1972, constitua un véritable banc d’essai pour le futur système monétaire européen. Lié au dollar dans une première étape (le serpent dans le tunnel, fig. 3), il s’en détacha dès 1973 (le serpent hors du tunnel).

Le serpent dans le tunnel était un système que nous pourrions qualifier de bi-dimensionnel. Il comportait en effet un mécanisme d’encadrement du cours de marché de chaque monnaie européenne participante par rapport au dollar et, d’autre part, un mécanisme d’encadrement du cours de marché de chaque monnaie européenne par rapport aux autres monnaies européennes membres de ce système. Il y avait un double ancrage. D’une part, les monnaies européennes cherchaient à limiter les fluctuations de leur cours de change par rapport au dollar et, d’autre part, elles limitaient leurs fluctuations entre elles, maintenant ainsi une certaine cohésion minimale.

L’expression «tunnel» provient de l’analogie graphique qui montre les évolutions ondulantes des monnaies européennes (serpent) contenues à l’intérieur d’un couloir (tunnel). En effet, l’ensemble des monnaies européennes était enfermé à l’intérieur d’un carcan défini par des marges de fluctuation (face=F0019 梁 2,25 p. 100) par rapport au dollar (tunnel). Ces monnaies européennes étant liées entre elles par des marges de fluctuations identiques (2,25 p. 100 de part et d’autre de leurs cours pivots respectifs), il en est découlé la terminologie analogique de «serpent à l’intérieur du tunnel». Le rapport Werner dénommait «bande» la zone comprise entre la marge supérieure et la marge inférieure autorisée pour le cours de change entre deux monnaies européennes. Cette bande «serpentera entre les limites absolues applicables au dollar selon l’évolution dans le temps...» (rapport Werner). L’abandon de la référence au dollar engendra en 1973 le «serpent hors du tunnel».

Mais le système monétaire européen, conçu sous la très forte influence de deux hommes d’État, Valéry Giscard d’Estaing, président de la République française, et Helmut Schmidt, chancelier de la république fédérale d’Allemagne (tous deux anciens membres du comité mis en place par Jean Monnet), ne vit le jour en tant que tel qu’en mars 1979. Le Conseil européen du 5 décembre 1978 ne laissa aucune ambiguïté quant à sa finalité: «À Brême, nos discussions ont porté sur un “système visant à établir une coopération monétaire plus étroite aboutissant à une zone de stabilité en Europe”. Nous avons considéré que l’établissement d’une telle zone constituait un “objectif hautement souhaitable” et nous avons envisagé “un système durable et efficace”.»

3. Les arrangements constituant le S.M.E.

L’écu panier et les arrangements liant entre elles les monnaies européennes

L’analyse couramment développée de la structure du S.M.E. procède souvent à une partition de l’ensemble des mesures en trois accores: un mécanisme d’intervention renforcé par la création de l’écu pour stabiliser les cours de change, la création d’un Fonds monétaire européen et un système de facilités de crédit pour les interventions sur le marché des changes.

Le Fonds monétaire européen devait naître «deux ans au plus tard après l’entrée en vigueur du système» de la fusion des «arrangements et institutions existants». Ce fonds n’a toujours aucune existence concrète. Notons qu’aucune résolution, aucun règlement, ni aucune décision du Conseil européen, de la Commission, du Comité des gouverneurs des banques centrales ou encore de quelque autre entité officielle n’a jamais apporté, au demeurant, la moindre précision sur ce qu’il devait effectivement être.

Le S.M.E. n’est donc finalement fondé que sur deux véritables piliers: un mécanisme d’intervention sur le marché des changes et un accord sur la manière de se procurer les financements nécessaires à de telles interventions. Reprenant intégralement le mécanisme de change du serpent, le S.M.E. a été conçu afin de pouvoir résister aux pressions spéculatives exercées par le marché des changes sur les monnaies de la Communauté, le mécanisme d’intervention soutenu par le système de crédit visant essentiellement à éviter les mouvements dits «erratiques» des taux de change. Nous retrouvons donc textuellement, dans la finalité du S.M.E., les principes qui ont gouverné le fonctionnement de toutes les versions du (non-)système monétaire international depuis 1922.

Dans cette optique de stabilisation des cours réciproques des monnaies (cette quête du Graal selon certains) et afin de déterminer les conditions optimales d’intervention sur le marché des changes, les instances communautaires ont décidé de déterminer un certain nombre de critères et de références devant suggérer ou impliquer l’immixtion des autorités monétaires nationales. Pour toutes les monnaies membres ont été définis les types d’interventions «obligatoires» ou «présumables» soit par rapport à une autre monnaie nationale communautaire, soit par rapport à une unité composite dénommée écu.

L’écu panier, unité de compte

Le S.M.E. a été construit à partir de l’ancienne unité de compte européenne, European Currency Unit , expression dont le sigle anglais correspond, en français, à une ancienne monnaie d’argent valant trois livres dans son acception la plus ordinaire (car il y avait aussi l’écu de six livres). L’écriture minuscule «écu» est aujourd’hui officiellement consacrée.

Définition de l’écu panier comme unité de compte

L’élément central du S.M.E., l’écu, est défini comme un panier; il est une somme de douze monnaies (tabl. 1).

Il s’agit, jusqu’ici, d’une définition purement nominale. L’écu panier n’est pas encore
créé à ce stade; seule sa définition, son nom, l’est. En tant que tel, il n’est qu’une simple unité de compte. Cette définition de l’écu n’est d’ailleurs pas immuable. Les accords ayant donné naissance au S.M.E. ont prévu un certain nombre de conditions pouvant entraîner une révision de cette définition. La première révision a eu lieu le 17 septembre 1984 avec l’entrée dans l’écu de la drachme grecque, la seconde le 21 septembre 1989 avec l’entrée de la peseta espagnole et de l’escudo portugais.

Rapidement introduite dans la comptabilité d’un certain nombre d’institutions communautaires et dans celle du Fonds européen de coopération monétaire (Fecom) à partir du 1er janvier 1979, cette unité de compte sera ensuite utilisée dans le domaine financier par le secteur privé à partir des années 1980-1981.

Les repères d’intervention relatifs aux monnaies nationales ou à l’écu

Les cours limites d’intervention

Le tableau 2 indique pour chaque pays membre du système monétaire européen les marges à l’intérieur desquelles sa monnaie est autorisée à fluctuer. «Des marges de fluctuation de 2,25 p. 100 seront fixées de part et d’autre de ces cours pivots bilatéraux...», c’est-à-dire par rapport aux autres monnaies nationales membres (accord de Bâle, 13 juin 1979). Avant que le cours de marché ne puisse être entraîné au-delà ou en deçà de ces limites, les autorités monétaires devront modifier leurs taux d’intérêt ou intervenir sur le marché des changes afin de rétablir l’ordre tel que borné par cette grille de parités applicable depuis le 8 octobre 1990. Cette grille reste valide tant que n’intervient aucun réajustement monétaire, rétrécissement des marges autorisées de fluctuation, ou introduction dans le S.M.E. d’une monnaie non encore membre.

Ni la drachme grecque ni l’escudo portugais ne participaient, à la fin d’octobre 1990, au mécanisme officiel de soutien des taux de change. L’Espagne s’est vu accorder, depuis son entrée le 19 juin 1989, des marges élargies, 6 p. 100 de part et d’autre des cours pivots bilatéraux. Le Royaume-Uni a fait entrer la livre sterling dans le S.M.E. le 8 octobre 1990, en retenant des marges identiques de 梁 6 p. 100. L’Italie avait bénéficié d’une telle faveur jusqu’au 5 janvier 1990. Ces limites censées contenir les cours de marché de chaque monnaie nationale membre sont fondées sur un écart par rapport aux cours pivots bilatéraux. Dès que ces cours limites sont atteints, l’intervention est «obligatoire».

Il existe une autre limite, fixée cette fois non plus par rapport aux cours pivots bilatéraux (c’est-à-dire par rapport aux autres monnaies nationales membres) mais par rapport aux cours pivots centraux (donc directement par rapport aux cours écu). On se réfère alors aux seuils de divergence.

Les seuils de divergence

L’indicateur de divergence est généralement considéré comme un signal d’alarme fonctionnant avant que les limites bilatérales soient atteintes. Mais cet indicateur de divergence n’a, dès l’origine, jamais eu de véritable importance en tant qu’indicateur, du fait des politiques systématiques d’interventions dites intramarginales, c’est-à-dire avant que les taux de change déterminés par le marché n’atteignent les cours planchers ou les cours plafonds.

En lui-même, l’écu défini comme un panier de monnaies n’apporte rien de nouveau pour le S.M.E. puisqu’il s’identifie à l’ancienne U.C.E. (unité de compte européenne). Mais c’est le rôle de cette U.C.E., nouvellement dénommée écu, qui a changé et pas seulement dans le mécanisme d’intervention. Son utilisation s’est élargie aux opérations entre banques centrales, mais il convient de reconnaître que l’utilisation de l’écu officiel, créé en contrepartie d’or et de dollars, reste tout à fait marginale. «Il ne constitue sûrement pas le cœur du S.M.E.» (Karl-Otto Pöhl, Lecture at the Institute for Economic Affairs , Londres, 2 juill. 1990). «Bien qu’il fasse partie intégrante du S.M.E., l’écu n’a joué qu’un rôle limité dans les mécanismes de gestion du S.M.E. Cela tient notamment au fait que les banques centrales ont préféré les interventions intramarginales; il en résulte que les interventions obligatoires et la constitution des soldes débiteurs à régler en écus sont demeurés assez limitées» (rapport Delors, chap. I, section 2.6, 1989).

Avant le S.M.E., on jouait sur la politique monétaire ou bien on intervenait directement sur le marché des changes pour stabiliser les monnaies européennes. Depuis le S.M.E., on intervient toujours bien sûr, mais les rôles sont moins vagues, moins ambigus. Les attributions sont un peu mieux précisées, les obligations presque clairement définies.

Il restait à se donner les moyens du respect des obligations ainsi engendrées par la mise en œuvre du S.M.E. Ces moyens furent prévus par l’accord de Bâle du 13 mars 1979 (accord fixant entre les banques centrales des États membres de la Communauté économique européenne les modalités de fonctionnement du système monétaire européen) et consistaient dans une série de financements à très court terme (F.T.C.T.), soutiens monétaires à court terme (S.M.C.T.) et concours financiers à moyen terme (C.F.M.T.). À noter que, depuis juin 1988, le C.F.M.T. a été regroupé avec les emprunts communautaires en un mécanisme unique de soutien financier à moyen terme (S.F.M.T.). L’utilisation de ces modes de financement est restée, pour le moins, relativement modeste.

Évolutif, le S.M.E. a été l’objet d’une série d’améliorations successives (accords de Palerme en 1985 et accords de Bâle/Nyborg en 1987) «en réaction à des modifications de l’environnement économique et financier». Une décennie de fonctionnement permet déjà de tirer un premier bilan.

4. Un premier bilan

Les limites de la stabilité monétaire

Le bilan que l’on peut positivement tirer du fonctionnement du S.M.E. est fort bien résumé dans le 59e rapport annuel de la Banque des règlements internationaux 1988-1989 (B.R.I.). «Quoique les réajustements de parités aient été assez fréquents durant les premières années de fonctionnement du mécanisme de change, ils se sont ensuite produits à des intervalles nettement plus espacés. Ces dernières années, la crédibilité de plus en plus grande des engagements de change a contribué à stabiliser les anticipations des marchés. D’un point de vue technique, le système n’a pas pourtant fonctionné exactement comme prévu à l’origine: l’attention s’est toujours portée essentiellement sur la position des monnaies dans la bande de fluctuation par rapport à leurs cours pivots bilatéraux; l’écu n’a joué qu’un rôle limité dans les mécanismes du S.M.E.; les interventions sur les marchés des changes ont généralement été effectuées avant que les monnaies n’atteignent leurs limites d’intervention; et les mécanismes de crédit ouverts aux différents instituts d’émission n’ont guère été sollicités. Les obligations d’intervention des banques centrales n’ont pas, en elles-mêmes, constitué une contrainte impérative pour les politiques qu’elles mènent sur leurs marchés monétaires internes. Toutefois, l’existence d’un cadre de coopération entre banques centrales a, sans nul doute, rendu politiquement plus acceptables des engagements de change qui ont servi de pivot à la politique monétaire dans les divers pays membres et qui ont permis de mettre une importante composante régionale de leur commerce international à l’abri de la variabilité des taux de change. On est largement convaincu, dans les pays participant au M.C.E. (mécanismes de changes européens), que les autres membres de la Communauté auraient intérêt à adhérer pleinement au système et à accepter les obligations qu’il comporte.»

La politique des taux d’intérêt, qui est devenue la principale méthode de gestion du cours extérieur de chaque monnaie nationale, a subi certaines déconvenues au cours des années 1989-1990. C’est dire l’importance considérable prise aujourd’hui par la convergence des politiques économiques et monétaires. Certains dénoncent la progression vers une union économique et monétaire en Europe comme une véritable atteinte à la souveraineté monétaire des pays. Mais que reste-t-il de ces souverainetés monétaires quand les évolutions erratiques du dollar obligent en certaines périodes tous les pays européens, voire le Japon, à rehausser dans des proportions importantes et démesurées leurs taux d’intérêt.

Les valeurs extérieures des monnaies nationales sont aujourd’hui essentiellement imposées par la spéculation, sans lien avec les données économiques dites fondamentales. Certes, une certaine stabilité a réussi à s’instaurer entre les monnaies européennes, mais pour combien de temps encore, étant donné l’évolution désastreuse du (non-)système monétaire international. Le dollar et le yen jouent au «yo-yo». Les monnaies européennes craignent de devoir en payer trop lourdement les conséquences. N’est-ce d’ailleurs pas déjà le cas?

Force est de constater que les banques centrales ne sont capables que de freiner (dans le meilleur des cas) les mouvements erratiques constatés sur les marchés des changes et non de les stopper ou de les inverser. Cette réalité est d’ailleurs officiellement comprise et énoncée pour ce qu’elle est, tant par la Federal Reserve que par la Deutsche Bundesbank. Le 10 octobre 1989 encore, attribuant au mot irréaliste un sens sans doute assez personnel, le président de la Federal Reserve américaine, Alan Greenspan, déclarait à Moscou que les «tentatives pour maintenir les taux de change à des niveaux irréalistes peuvent conduire à déstabiliser les flux internationaux de capitaux et devront être abandonnés tôt ou tard». Or, précisément, le niveau «réaliste» du change pour une monnaie nationale donnée n’est pas nécessairement celui qui correspondrait aux données fondamentales de son économie.

Le système monétaire européen se trouve encore aujourd’hui dans une phase de convalescence, après une naissance quelque peu douloureuse, et les risques d’une attaque foudroyante restent présents à tout instant. Les monnaies du S.M.E. sont fortement soumises aux variations du dollar américain, d’où l’urgence, selon la Commission, de progresser rapidement et sûrement vers l’union économique et monétaire, telle qu’elle est proposée par le rapport Delors publié en 1989. La figure 7 confirme le fondement de l’inquiétude pour le cas où le futur ressemblerait au passé, voire simplement au présent.

L’attrait exercé par le S.M.E. sur certains pays non membres

S’il est vrai que la décennie maintenant écoulée a été riche en soubresauts monétaires, le système monétaire européen existe toujours et prouve, chaque jour nouveau, sa nécessité. Son attrait, ainsi que celui qu’exerce la Communauté des Douze en général, montre sa consistance. Il a réussi à créer une oasis de stabilité, certes très fragile, en Europe.

Aucun des pays membres du S.M.E. n’a jamais réellement voulu le quitter. Les partisans d’un retrait de la France en 1982-1983 n’ont heureusement jamais été écoutés. La Grèce et le Portugal, pays européens membres de la C.E.E. mais pas encore membres du S.M.E., étudient activement leur participation directe à ce mécanisme d’encadrement des cours de marché. L’adhésion du Portugal était souhaitée par ses dirigeants comme devant être effectuée «vers 1992». La Grèce, par la voix du gouverneur de sa banque centrale, déclarait qu’elle serait prête à intégrer le S.M.E. «d’ici à 1993».

Nombreux sont, par ailleurs, les pays qui, non membres de la C.E.E., s’intéressent de très près au mécanisme de change caractérisant le S.M.E.

La Norvège annonçait en juillet 1990 vouloir bénéficier de l’intégration communautaire en subordonnant sa couronne aux mécanismes de change européen, dans le courant de 1991. La Suède, par la voix du gouverneur de sa banque centrale, n’excluait pas non plus, à terme, une participation directe au S.M.E. L’Autriche a, depuis longtemps, rattaché de facto sa monnaie au deutsche Mark, ne la laissant pas quitter une bande de 梁 0,3 p. 100 depuis plusieurs années. Il est patent que, malgré tous ses problèmes, la Communauté économique européenne continue d’attiser l’intérêt des pays voisins, certains allant jusqu’à faire acte de candidature. Citons Malte, la Turquie, Chypre, l’Autriche. La Suisse, la Finlande et la Suède espèrent bénéficier d’un statut de membre associé.

5. L’union économique et monétaire européenne

Lors de sa réunion des 27 et 28 juin 1988 à Hanovre, le Conseil européen avait confié à un comité, présidé par Jacques Delors, président de la Commission des communautés européennes, et composé des gouverneurs des banques centrales européennes plus trois membres extérieurs, «la mission d’étudier et de proposer les étapes concrètes devant mener à l’union économique et monétaire».

Le rapport de ce comité a été rendu public, le 17 avril 1989, à Luxembourg sur le plateau de Kirchberg. Il a été signé par tous les gouverneurs des banques centrales de la Communauté qui, toutefois, n’étaient membres de ce comité qu’«à titre personnel».

Ce rapport se compose de trois parties. Le comité a consacré la première aux développements passés et présents de l’intégration économique et monétaire dans la Communauté, mettant en évidence le degré croissant d’intégration économique que celle-ci connaît aujourd’hui et soulignant que le maintien de ce processus exigera une coordination plus intense et plus efficace des politiques nationales.

Dans la seconde partie de son rapport, le comité a considéré qu’il était essentiel de définir clairement les traits principaux de l’union économique et monétaire et d’exposer pleinement ses implications avant d’examiner comment elle pourrait être atteinte. La réalisation de cet objectif requerrait une modification du traité et des modifications subséquentes dans les législations nationales et impliquerait la création d’un système européen des banques centrales (S.E.B.C.). Une monnaie unique y est considérée comme n’étant pas strictement nécessaire à une union monétaire, mais comme témoignant d’un total engagement à réaliser une fixation définitive des parités de change. Le comité a considéré que l’écu pouvait devenir cette monnaie unique sans rupture de sa valeur.

La troisième partie du rapport expose les étapes concrètes conduisant à l’union économique et monétaire. Chaque étape est distincte, mais il s’agit d’un processus unique. «Il est convenu que la création d’une union économique et monétaire doit être envisagée comme un processus unique. La décision d’entamer la première phase devrait être une décision d’engager tout le processus, bien qu’il comporte des étapes destinées à guider la progression vers l’objectif final» (paragraphe 39).

Devenu la référence de base de tout discours ou projet en matière de construction monétaire européenne, ce plan Delors a retenu trois étapes concrètes devant mener à l’union économique et monétaire.

Les principales mesures de la première étape

La première étape «représente l’engagement du processus de création de l’union économique et monétaire. Son objectif serait d’accroître la convergence des performances économiques en renforçant la coordination des politiques économiques et monétaires dans le cadre institutionnel existant».

Une modification du traité de Rome, ratifiée par les parlements des pays membres, est considérée comme une condition nécessaire permettant de passer à la deuxième étape. La participation de toutes les monnaies de la Communauté au mécanisme de change du S.M.E. est jugée importante, les mêmes règles s’appliquant à tous les participants.

Les principales mesures de la deuxième étape

La deuxième étape ne pourrait commencer que lorsque le nouveau traité serait entré en vigueur. Elle «doit être considérée comme une phase de transition vers l’étape finale et représenterait donc surtout une phase d’apprentissage devant aboutir à une prise de décision collective, la responsabilité ultime des décisions incombant toujours, à ce stade, aux autorités nationales...» (paragraphe 55). Il est prévu la création d’un système européen de banques centrales qui absorberait les arrangements monétaires institutionnels existant (le Fecom, le comité des gouverneurs des banques centrales, les comités d’analyse monétaire, de politique des changes et de surveillance bancaire, ainsi que le secrétariat permanent). «La tâche essentielle pour le système européen de banques centrales (S.E.B.C.) au cours de cette étape serait d’amorcer la transition à opérer, depuis la coordination par le comité des gouverneurs des banques centrales de politiques monétaires nationales indépendantes pendant la première étape, jusqu’à la formulation et la mise en œuvre d’une politique monétaire commune par le S.E.B.C. lui-même – ce qui serait le propre de l’étape finale... La difficulté fondamentale inhérente à cette transition résiderait dans l’organisation d’un transfert progressif du pouvoir de décision des autorités nationales à une institution communautaire... De plus, un certain montant de réserves de change serait mis en commun et servirait à intervenir sur le marché des changes conformément aux orientations arrêtées par le conseil du S.E.B.C. Enfin, le S.E.B.C. exercerait des fonctions réglementaires dans le domaine monétaire et bancaire afin de parvenir à une harmonisation minimale de certaines dispositions (telles que les réserves obligatoires ou les accords de paiement), nécessaires pour la conduite future d’une politique monétaire commune» (paragraphe 57).

Les principales mesures de la troisième étape

La troisième étape dite finale commencerait avec le passage à des parités irrévocablement fixes et l’attribution aux institutions communautaires de toutes les compétences monétaires et économiques décrites dans le deuxième chapitre de ce rapport. «Au cours de l’étape finale, les monnaies seraient remplacées par une monnaie communautaire unique» (paragraphe 58).

Il est essentiel de noter qu’aucune date n’était fixée pour aucune de ces trois étapes. Interrogé un mois après la publication de ce rapport Delors, le gouverneur de la Deutsche Bundesbank, Karl-Otto Pöhl, déclarait dans un entretien (23 mai 1989) au journal Le Monde : «La grande question était de savoir si on pouvait arriver, un jour, à disposer d’un organe de décision commun, impliquant, comme le dit Mme Thatcher, un transfert de souveraineté allant très loin. La décision reviendra aux gouvernements et aux parlements, mais c’est un fait que tous les membres du comité ont accepté cette idée.»

En mai 1989, les ministres des Finances des Douze se rencontraient lors d’une réunion informelle à S’agaro (Espagne) pour étudier le rapport Delors. Les propos publics tenus par les différentes délégations ont officialisé un très net clivage entre, d’une part, les partisans d’une entrée quasi immédiate dans la première phase du plan Delors, avec engagement de poursuivre jusqu’à la troisième, et, d’autre part, les inconditionnels s’opposant systématiquement aux deuxième et troisième étapes de ce plan Delors. Dans le premier groupe se retrouvaient la France, la République fédérale, l’Espagne, l’Italie et la Belgique. Le second comprenait surtout la Grande-Bretagne qui criait haut et fort son opposition à toute nouvelle révision du traité de Rome, qui venait juste d’être révisé dans le cadre de l’adoption de l’acte unique, mais aussi d’autres pays plus discrets, satisfaits de voir les Britanniques porter le chapeau.

Le Conseil de Madrid fut néanmoins un succès relatif, puisque les «chefs d’État et de gouvernement se sont en fait accordés sur un point essentiel: lancer dès le 1er juillet 1990 la première étape du plan Delors impliquant une meilleure coordination des politiques entre les ministres des Finances et les gouverneurs des banques centrales et devant entraîner la pleine participation des États membres de la C.E.E. au mécanisme de change européen, c’est-à-dire l’entrée de la drachme et de l’escudo dans le S.M.E. ainsi que la disparition des marges élargies de fluctuation.

Le sommet de Maastricht a décidé de «parvenir, avant le 1er janvier 1999, à la création d’une monnaie unique». «L’Europe sera monétaire ou ne sera pas», écrivait Jean Monnet, un des hommes qui ont le plus œuvré pour la construction de cette Europe. Mais le problème fondamental est indubitablement un problème intellectuel avant même d’être un problème politique. La construction par unification (et non par annexion, consentie ou non) d’une zone monétaire dotée d’une monnaie bancaire unique n’a, en effet, pas de précédent dans l’histoire.

Encyclopédie Universelle. 2012.

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